Mbeurou Askan Wi prend sa retraite aprés 45 ans : Tyson, grandeur et décadence d’un champion

«tyson : le jour et la nuit.» tel pouvait bien être le titre d’un film retraçant la carrière de Mbeurou Askan Wi qu’on n’a pas du mal à diviser en deux parties assez dissonantes. Il n’est certes pas parti sur une victoire. Il a même quitté sur quelques défaites. Mais Mohamed Ndao reste ce qu’il est : un champion hors pair doublé d’un professionnel abouti qui a fortement participé à donner une toute autre image à la lutte. Sunu Lamb tente de retracer la carrière de tyson, qui a eu 45 ans en ce mois de février finissant, et de la faire apprécier par quelques observateurs avertis.

 

 

1995-2015 : 11 victoires et 6 défaites en 20 ans de carrière

S’il est une chose indéniable et constante, c’est que Tyson marquera à jamais la lutte sénégalaise de par son parcours et sa particularité. Cette histoire de Mohammed Ndao avec la lutte a commencé un certain 31 juillet 1995 quand il rencontrait Nguèye Loum, actuel coach de Gouye-Gui. Du 31 juillet 1995 au 3 mai 2015, date de son dernier combat contre Gris Bordeaux, Tyson aura fait vingt longues années dans le milieu même si, avec sa suspension suite à son deuxième combat contre Bombardier, il est resté trois ans sans activité. En 20 ans de présence dans l’arène, le théoricien de la génération Boul Faalé a disputé 17 combats sanctionnés par 11 victoires et 6 défaites. Il a battu entre autres Alioune Sèye, Mohammed Ali, Toubabou Dior, Manga 2, Mor Fadam. Ses 6 défaites lui ont été infligées par quatre lutteurs qui, excepté Gris Bordeaux, ont tous été des Rois des arènes : Yékini et Bombardier avec deux victoires pour chacun, Balla Gaye 2 et Gris Bordeaux.

17 combats contre 13 lutteurs

Bien qu’ayant disputé un total de 17 combats, « Borom face to face » n’a pourtant rencontré que treize lutteurs différents. En effet, parmi les lutteurs, il y en a quatre qu’il a rencontrés deux fois : Mor Fadam (7 octobre 2000 et 7 juillet 2001), Tapha Guèye (6 juillet 1997 et 30 mai 2004), Yékini (1er janvier 2006 et 4 avril 2010), Bombardier (25 décembre 2002 et 7 janvier 2007). Voici les treize lutteurs que Tyson a croisés : Nguèye Loum, Daouda Dop, Cheikh Mbaba, Alioune Sèye, Mohamed Ali, Toubabou Dior, Tapha Guèye, Manga 2, Mor Fadam, Bombardier, Yékini, Balla Gaye 2 et Gris Bordeaux.

Deux bourreaux nommés Yékini et Bombardier

À tort ou à raison, on accuse l’enfant de Ndangane de n’avoir terrassé que ses aînés de plusieurs années dans l’arène tout en étant impuissant face aux lutteurs de sa génération,  et Yékini en l’occurrence. Un petit regard dans le rétroviseur fait remarquer que de Mor Fadam à Nguèye Loum en passant par Tapha Guèye, Mohamed Ali, Toubabou Dior, Cheikh Mbaba, Daouda Dop, toutes les victimes de Tyson sont en retraite depuis plusieurs années maintenant. Toutes les fois qu’il a croisé des lutteurs de sa génération ou qui l’ont précédé, il s’en est sorti avec des défaites : Bombardier (25 décembre 2002 et 7 janvier 2007), Yékini (1er avril 2006 et 4 avril 2010), Balla Gaye 2 (31 juillet 2011) et Gris Bordeaux (3 mai 2015).

7 janvier 2007 – 4 avril 2010 : quand un sakhi lui coûte trois saisons blanches

Le 7 janvier 2007, le Pikinois rencontrait pour une deuxième fois le Mbourois qui l’avait déjà battu le 25 décembre 2002. Pour cette revanche très attendue du public, Tyson devait se venger de celui qui lui a infligé la première défaite de sa carrière en mettant fin à 7 ans de règne (1995- 2002). Mais, après une première action qui se terminait au sol, l’arbitre Sitor Ndour, estimant qu’il n’y avait pas de chute, ordonna qu’on reprenne le combat. Mais, à la surprise générale et contre toute attente, Tyson décida de sortir de l’enceinte et bouder : c’est le fameux « sakhi du siècle ». À la décision du CNG de le suspendre pendant trois ans, Tyson répondait par une conférence de presse à l’hôtel Sofitel Téranga pour dire qu’il laissait la lutte pour de bon. Après avoir purgé ses trois ans et, à la demande générale suite à moult interventions de différentes personnalités, Tyson, qui sera entre-temps élevé au titre de Cheikh de la Tarikha niassène, acceptera de revenir et croiser Yékini qui le battait une deuxième fois le 4 avril 2010.

Un indice de performance de 64%

En vingt ans de carrière, Tyson n’a noué le nguimb que 17 fois, soit en moyenne moins d’un combat par saison. Aussi, le leader de l’écurie Boul Faalé a récolté 11 victoires contre 6 défaites, soit un indice de performance de 64%. Pas si mal que ça.

Le Boul Faalé révolutionne l’arène

Dès son arrivée dans l’arène, Tyson s’est totalement démarqué de ce qui se faisait jusque-là. Sous la bannière de son drapeau étoilé et de sa fameuse danse, en réalité celle du grand lutteur Fabirama Bop dit Fabi Félir, le lutteur s’est fait une marque et s’est véritablement distingué. Il charme les sponsors qui investissent l’arène en masse, initie des voyages à l’extérieur pour se perfectionner et impose une façon toute nouvelle de faire. D’aucuns, qui se faisaient une idée totalement biaisée du lutteur en général, reconsidèrent leur position et donnent plus de valeur aux hommes en nguimb : c’est la génération Boul Faalé. Moins inspirée a été cependant sa décision d’arborer le drapeau des USA, en référence peut-être à son homonyme et grand boxeur de son temps, Mike Tyson en l’occurrence. Mais Balla Gaye avait été très inspiré, lors de leur confrontation du 31 juillet 2011, en s’affichant avec un Tee-shirt sur lequel on pouvait lire « j’aime mon pays ». Une réponse pertinente à l’American Way of life et du drapeau des USA, diraient certains.

Une carrière à deux vitesses

Si ses débuts ont été une réussite insolente avec des victoires prestigieuses de rang, la fin de carrière de Tyson a été autrement moins heureuse. En effet, du 31 juillet 1995 (contre Nguèye Loum) au 7 juillet 2001 (contre Mor Fadam), l’enfant de Kaolack Ndangane a surfé sur les succès, ne connaissant aucune défaite et parvenant à déchaîner les foules partout où il passait. Il était même le Roi des arènes d’alors. C’est cela le jour pour Tyson. Mais le 25 décembre 2002, il sera stoppé net par un baobab venu directement de Mbour. Bombardier lui inflige sa première défaite et lui ravit en même temps la couronne de Roi des arènes. Mais Tyson réussira à se relever lors de son combat suivant face à Tapha Guèye, le 30 mai 2004. C’est la dernière victoire dans l’arène du lutteur qui, de 2004 à 2015, sera successivement battu par Yékini, Bombardier, Balla Gaye et Gris Bordeaux, non sans avoir observé plusieurs saisons blanches. C’est la nuit pour le Pikinois. Les amateurs et autres observateurs en sont même arrivés à se demander ce qui était réellement arrivé à Tyson qui, malgré le sérieux et le professionnalisme renouvelés dans la préparation de ses combats, décevait chaque fois qu’il faisait face à ses adversaires.

Source : Sunu Lamb