CAN 2021 : l’irrésistible ascension des Comores !

Jeune nation aux yeux de la FIFA, l’archipel des Comores a décroché une première qualification historique pour la Coupe d’Afrique des Nations. Retour sur une ascension initiée il y a sept ans par un Marseillais.

C’est l’histoire d’un archipel de l’Océan Indien lié, comme Madagascar, au passé colonial et esclavagiste français. L’histoire d’un regroupement d’îles, Grande Comore, Anjouan, Mohéli et Mayotte, qui en 1975 ont pris des chemins différents. Les trois premières devenant indépendantes, et connues aujourd’hui comme l’Union des Comores, la quatrième restant rattachée à la France. Sur les pelouses, l’équipe nationale des Comores voit le jour en 1979, mais ce n’est qu’en 2005 qu’elle est reconnue par la FIFA.

Depuis cette date, les Cœlacanthes – poisson à l’allure préhistorique vieux de 350 millions d’années – cravachent pour intégrer le gotha du football africain et se faire connaître sur la scène internationale. 2010 marque leur première participation aux éliminatoires de la coupe d’Afrique des Nations. Le chemin sera long. Le Stéphanois Aboudoulaide Mzé M’baba inscrit le premier but de l’histoire de la sélection en compétition officielle, mais les troupes de Mohamed Chamité ne prennent qu’un point (1-1 face à la Libye) et terminent dernières du groupe.

Une sélection à l’accent marseillais

Onze ans et quelques désillusions plus tard, les Comores écrivent la première page d’une histoire que l’on espère longue et belle. Un nul ramené du Togo (0-0) juste à temps (avant un dernier match face à l’Egypte, co-leader du groupe) a suffi au bonheur d’Amir Abdou. Cet éducateur de la ville de Marseille qui en 2014 débarque à la tête de la sélection avec comme expérience celle de coach de l’Entente Golfech-Saint Paul, club de DH du Tarn-et-Garonne. Accompagné de Ben Amir Saadi, Abdou se met en quête de joueurs. Son vivier : les championnats amateurs français. Son but : convaincre les binationaux de rejoindre la sélection.

L’équipe se structure, mais chaque éclaircie est rapidement suivie de nuages gris. L’instabilité politique du pays, en proie à des coups d’État permanents et le manque de garanties financières annulent pratiquement les progrès aperçus. Elimination face au Kenya dès le deuxième tour des qualifications pour la CAN 2015 (Maroc), quatrième place des éliminatoires de la CAN 2017 (Gabon) – malgré un premier succès en compétition face au Botswana (1-0) le 24 mars 2016… La campagne pour la CAN 2019 laisse cependant entrevoir un avenir prospère.

La campagne d’Egypte offre d’autres ambitions aux Comores

Si les Comores ratent le train pour l’Egypte, les progrès entrevus sont spectaculaires. Victoire contre le Malawi, matches nuls contre le Maroc et le Cameroun. L’équipe peut même ambitionner de participer à la compétition, au vu des circonstances. Le Cameroun ayant décliné l’organisation au tout dernier moment, il pourrait être disqualifié. Mais le TAS déboute les Comoriens. Qu’importe, cette petite nation passée de la 198e place mondiale en 2014 au 130e rang aujourd’hui semble ne plus craindre personne.

En 2019, l’archipel se donne les moyens de ses ambitions et inaugure un nouveau stade (le Stade omnisports de Malouzini). Ils entament leur campagne de qualification pour la Coupe d’Afrique des Nations 2021 (repoussée en 2022) le couteau entre les dents. Efficace, la sélection s’en va gagner au Togo (0-1), grâce à Faiz Selemanie, qui évoluait sous les couleurs de l’Athletico Marseille en 2014 et aujourd’hui à Courtrai. S’appuyant sur une défense de fer (3 clean sheet, 2 buts encaissés), elle accroche l’Egypte dans son stade (0-0), bat le Kenya (2-1) et reste invaincue après cinq rencontres (3 nuls, 2 victoires).

Sept ans d’efforts pour toucher au but

Avec 9 points au classement, les Comores ont pris la première place du Groupe G, avant une dernière rencontre de prestige face à l’Égypte, lundi. Hier soir, c’est un sentiment de libération qui prédominait. Surtout chez Amir Abdou, qui voyait sept ans d’efforts récompensés. «On est qualifiés ! La fierté que je ressens pour mon pays est indescriptible ! Bravo à mes joueurs, mon staff, ma fédé, merci au Président. Et un grand merci à vous qui êtes des supporters incroyables. C’est ensemble que nous avons marqué l’histoire. Rendez-vous à la CAN !,» pouvait-il exulter.

Les Cœlacanthes de Youssouf M’Changama (Guingamp), joueur le plus capé avec 38 sélections, El Fardou Ben Mohamed (Etoile Rouge), capitaine et meilleur buteur de la sélection avec 10 réalisations, Ali Ahamada, ancien portier célèbre du TFC aujourd’hui sans club ou Ahmed Mogni (FC Annecy), comme la Gambie, seront présents au Cameroun l’an prochain. Avec l’espoir fou pour ce pays aux 850 000 habitants traversé par les doutes et de multiples tourments de réaliser un nouvel exploit.

FM