Des faubourgs d’Anvers aux trottoirs de Molenbeek, de l’académie de Sclessin à Liège au stade Jan-Breydel de Bruges, ils en ont rêvé. L’élimination face au pays de Galles, à Lille (1-3, à l’Euro 2016), n’a fait qu’aiguiser leurs regrets nés au Brésil, au lendemain de la défaite face à l’Argentine (0-1, en 2014). Pour leur troisième quart de finale de rang en compétition internationale, les Diables rouges veulent se mesurer au favori du tournoi. Et prouver que leur classe d’âge peut monter sur une plus haute marche, faire aussi bien ou mieux que les pionniers, quatrièmes de la Coupe du monde 1986.
«On a travaillé ce match depuis deux ans, soulignait leur sélectionneur Roberto Martinez, mardi. On n’est pas là par accident. Quand je vois les efforts de Nacer Chadli depuis six mois pour revenir de blessure et appartenir au groupe… Les joueurs pensent qu’ils peuvent battre le Brésil mais personne ne s’attend à ce que nous le fassions. On est aussi prêts qu’on pouvait l’être. L’Espagne(championne du monde 2010, championne d’Europe 2008 et 2012) avait quelque chose de spécial. Ce groupe a montré qu’il avait lui aussi ce petit truc. La différence, c’est que le Brésil a déjà gagné des titres et sait comment faire. Mais si nous jouons bien, nous avons une chance.»
Maturité, fraîcheur et ressources collectives
Il faudra la saisir. Maintenant ou jamais. Pour effacer ce sentiment qui escorte une bande de très bons joueurs qui a beaucoup parlé ou promis. Mais n’a jamais rien gagné en équipe nationale. Parce que le noyau des Diables va se fissurer avec la retraite de quelques-uns après l’épisode russe. Comment imaginer le Plat Pays, onze millions d’habitants, concentrer durablement autant de talents au même moment, au même endroit ? Tous ces joueurs ont pris très jeunes le risque de l’exil, de la pression. Ils l’ont assumé.
23La Belgique est invaincue lors de ses vingt-trois derniers matches (18 victoires, 5 nuls), série la plus longue parmi les équipes toujours en course dans cette Coupe du monde.
Peut-être plus qu’ils ne l’imaginaient. Avant de décrocher, un peu partout en Europe, la reconnaissance et les titres nationaux qui font de cette génération une vraie menace. «Je ne sais pas qui nous a en premier qualifiés de génération dorée, souriait Vincent Kompany, mercredi. On a parlé pendant des années duPortugal (1996-2006) mais ils n’ont rien gagné. Je sais ce que nos joueurs ont réussi. Pour un pays comme la Belgique, c’est très important. Mais il y a le Brésil sur le chemin.»
Forte de ses différences culturelles et linguistiques, la Belgique n’en a pas peur. La qualité et la vitesse de son jeu vertical, son pressing haut sont des armes efficaces. Ses douze buts depuis le début de la compétition et ses 39 % de tirs cadrés en attestent. En phase de groupes puis face aux Japonais (3-2), les Diables rouges ont prouvé leur maturité, leur fraîcheur et leurs ressources collectives. Fellaini et Chadli vont ce soir booster un ensemble qui a terminé sur des bases athlétiques élevées au tour précédent.
Fellaini d’entrée, De Bruyne décalé ?
Roberto Martinez a supervisé un dernier entraînement jeudi matin à Dedovsk. Le technicien espagnol n’a pas dévoilé son onze titulaire, jeudi soir à Kazan. Marouane Fellaini devrait cependant l’intégrer avec une quasi-certitude. Ce qui décalerait De Bruyne côté droit, au détriment de Mertens, mais dans une position légèrement plus basse que l’attaquant de Naples, pour réduire les espaces du duo Marcelo-Neymar. Enfin, à gauche, l’option Chadli paraît probable, au détriment de Carrasco. Avec une plus grande probabilité que l’entrée en défense centrale de Vermaelen, qui décalerait Vertonghen dans le couloir gauche.
Les ego, enfin, sont rangés derrière Romelu Lukaku, génial feinteur sur le centre de Thomas Meunier, offrande à Chadli qui a offert la qualification en huitièmes de finale au bout du bout du temps additionnel. Celui des grands joueurs est souvent celui des grands rendez-vous. C’est le moment de changer de dimension. Ou bien d’éteindre l’étincelle qui attisait cette flamme.