Après l’échec anglais, l’inquiétante chasse au bouc émissaire Sterling

De nombreux journalistes sportifs se sont manifestés pour défendre le jeune milieu de terrain de Manchester City, cible de la presse tabloïd anglaise.

À chaque fois qu’elle est éliminée d’un grand tournoi de football, l’Angleterre, sortie sans gloire en huitièmes de finale par l’Islande à Nice (1-2), se cherche un bouc émissaire, et l’année 2016 ne fait pas exception à la règle. Après cet Euro en France, celui de la sélection aux Trois Lions s’appelle Raheem Sterling, et le pilonnage de la presse populaire envers lui s’avère tellement glauque que de nombreux journalistes sportifs britanniques se sont manifestés pour le défendre.

Le milieu de terrain de Manchester City a certes fait l’objet de critiques sportives vu la faiblesse de ses performances, qui étaient somme toute logique (dans les colonnes deL’Equipe, Joey Barton le jugeait, avant le match contre l’Islande, «mauvais depuis deux ans maintenant») mais c’est à un véritable déchaînement sur sa vie personnelle que s’est livré la presse tabloïd. Des attaques symbolisées par cette une du Sun montrant des images d’une maison de luxe exhibées par le joueur sur son compte Snapchat (pas la sienne, mais celle qu’il a achetée pour sa mère) sous le surtitre «Sterling touche à nouveau le fond» (un jeu de mots sur les tracas de la livre sterling depuis le référendum sur la sortie de l’Union européenne).

Le quotidien a même utilisé une photo du joueur pour illustrer un article sur un joueur semi-pro devenu dealer de drogue. Le Daily Mail, l’autre gros tabloïd britannique, s’est livré aux mêmes attaques.

«Voici la dernière étape d’une campagne visant à victimiser un jeune footballeur anglais qui n’a – et nous ne pouvons pas répéter ces quelques mots suffisamment ou assez fort – rien fait de mal. Un joueur de 21 ans a du mal à affronter la pression sur la scène internationale? Faisons-en un bouc émissaire et regardons si cela aide», s’indigne la version britannique du site Football365. «Sterling est riche, il a confiance en lui et il vient juste d’échouer à se montrer performant pour l’Angleterre, mais rien de tout cela n’est un crime, ni ne mérite une éviscération en public», écrit The Independent.

Le site Sport360° rappelle lui que Sterling, déjà critiqué pour son départ de Liverpool à City ou son refus de jouer un amical en 2014 (le «Tired-gate») est la dernière victime d’une liste qui a compté avant lui, notamment, David Beckham après son expulsion en huitièmes de finale de la Coupe du monde 1998 en France, et cite les propos de Sven-Goran Eriksson après un autre carton rouge, celui essuyé par Rooney en quarts de finale du Mondial 2006: «Wayne Rooney est le golden boy du football anglais. Ne le tuez pas car vous aurez besoin de lui.»